Noël arrive à grands pas et nous entrons dans la période des listes au Père Noël. Ce moment où enfant on s’amusait à découper les jouets qui nous faisaient rêver dans les catalogues. Si on feuillette ces catalogues de jouets, on observe rapidement un monde en rose et bleu depuis longtemps. Ça a été mon sujet de mémoire de Master 1 l’année dernière. Plus précisément, l’intitulé est « L’impact éducationnel des catalogues de Noël de jouets pour enfants en France contemporaine ». Dans cet article, je vais vous présenter mes résultats à la suite d’une analyse des catalogues de l’année passée et un questionnaire. Alors, est-ce que Noël est toujours rose et bleu ?
Le catalogue de jouets toujours très consommé
Tout d’abord, il est important de rappeler que le catalogue de jouets à Noël est toujours un moyen de communication très consommé de nos jours. Même s’il existe aujourd’hui d’autres moyens de s’informer pour ses achats, le catalogue est distribué dans les boîtes aux lettres, même si vous collez une petite étiquette contre les publicités. Il est d’ailleurs consommé par les enfants, lorsqu’ils font leur liste.
Ce catalogue suit des procédés marketing très genrés. Déjà avec la séparation distincte des genres (même si aujourd’hui elle n’est plus si distincte) qui nous offre deux types de jouets différents : ceux pour filles et ceux pour garçons. Deux mondes très différents.
Les enfants sont conscients lorsqu’ils feuillettent ces catalogues quelle partie leur est adressée. On se retrouve donc avec des petites filles voulant jouer à la poupée, à la ménagère et à la création ; et des petits garçons aux héros, aux véhicules et aux jeux en plein air. Plus que de vouloir jouer à ces jeux, ils veulent faire « comme maman » et « comme papa » et rejettent les jeux adressés au genre opposé.
Le catalogue de jouets à la recherche de l’égalité ?
Ces dernières années, des progrès ont eu lieu dans la composition des catalogues de jouets. Adieu les notions de « jouets pour filles » et « jouets pour garçons », des mondes, des univers sont désormais utilisés sans couleurs genrées. Autre avancée, nous oublions le lexique comparant les jouets à la vie des parents. Après analyse des catalogues de 2021, il y a même une parité du nombre de petits garçons et de petites filles. Des efforts en apparence, oui mais…
Si en apparence, les catégories ne sont plus genrées, ce n’est pas réellement le cas. On retrouve toujours dans le fond les mêmes contenus qui se suivent en fonction du genre dans la lecture. De plus, dans chaque catégorie, la parité n’y est pas toujours. Dans les poupées, nous avons majoritairement des petites filles et lorsqu’il y a un petit garçon, il ne s’occupe pas forcément de son enfant, mais de son frère, sa sœur.
Si les couleurs utilisées par les catalogues sont neutres, ce n’est pas le cas des packagings. On retrouve d’ailleurs beaucoup de pages dédiées à des marques en particulier. La page Barbie par exemple, reprend l’identité de la marque, et est donc toute rose.
Des efforts sont observables avec une recherche visant à amener le genre opposé dans les visuels, notamment avec ce que je nomme des visuels non conformes. Par exemple, c’est lorsqu’on observe sur un visuel un petit garçon jouant à la poupée ou une petite fille jouant avec des voitures. Ces efforts sont remarquables et font avancer les choses, mais ces visuels transmettent eux aussi des stéréotypes.
Que veulent les consommateurs ?
Si on regarde maintenant les réponses à mon questionnaire, on voit un engagement de la part des adultes à vouloir dégenrer les jouets. Mais, les enfants se dirigent pourtant vers des choix genrés. Les parents/adultes achetant en fonction des enfants, continuent de consommer de manière genrée.
Néanmoins, la parité est un souhait très désiré. Les consommateurs veulent retrouver une parité dans la représentation des genres au sein de chaque catégorie des catalogues. Les univers proposés leur plaisent, ce sont les images internes qu’il faut changer.
La stratégie des visuels non conformes a fait beaucoup de bruit avec beaucoup d’indignation dans les réactions du grand public. Les réponses montrent que cette stratégie n’est pas totalement payante. Ces visuels ne plaisent pas forcément et sont qualifiés comme ne représentant pas la réalité.
Une solution pour l’égalité des chances
Comment satisfaire tout le monde ? On se retrouve avec des catalogues critiqués pour leur division genrée, mais aussi pour leurs initiatives. En combinant les résultats de mes enquêtes, je suis arrivée à une solution qui permettrait de mettre tout le monde d’accord, tout en veillant à respecter l’égalité dans les représentations. Dans chaque catégorie, il faudrait 50 % de visuels représentant les deux genres ensemble, 25 % de visuels dits conformes et 25 % de visuels non conformes. Ainsi, les visuels non conformes ne feront plus tâches et seront mis à la même échelle que les visuels conformes.
Une catégorie a réussi à ce jour à prôner (plus ou moins) une parité dans les visuels, il s’agit de la partie « comme les grands ». Pourquoi ? Parce que c’est la catégorie qui est en évolution dans la vie réelle. Les débats sur la parité sont souvent autour des tâches ménagères. Cela se ressent donc dans le monde des petits.
Pour que les choses changent, il faut que les concepteurs de catalogues et les marques y mettent du leur. Cela ne se fera pas dans un claquement de doigts, évidemment. Mais il suffit qu’un catalogue ose le faire pour que cela résonne. Si les débats dans la vie réelle ont permis de changer le contenu de la catégorie « comme les grands », pourquoi pas ne pas essayer de faire le contraire ? Peut-être qu’en changeant les catalogues, cela aura des impacts dans notre vie.
Pourquoi c’est important ?
Cela peut sembler anodin de mettre tel ou tel jouet dans les mains des enfants, mais cela ne l’est pas. Dès l’enfance, on offre deux mondes des possibles différents aux enfants. On leur expose les barrières auxquelles ils feront face plus tard, avec seulement le genre comme argument. L’égalité femme-homme se reflète dans les jouets.
L’objectif de cet article n’est pas de vous culpabiliser. Je souhaite seulement vous sensibiliser. Je ne parle pas des consommateurs, mais des concepteurs. Il est normal de consommer de manière genrée quand la société nous pousse à le faire et communique en ce sens.
C’est pour cela qu’il faut changer les choses. Alors, chers catalogues de jouets, mettez sur un même pied d’égalité les petites filles et les petits garçons. L’égalité, ça passe aussi par l’éducation par le jouet, qui aujourd’hui reste très genrée et dans le rejet de ce qui semble comme la possible appartenance à un autre genre que le nôtre. Transgresser les stéréotypes reste très difficile. Osez prendre les devants et engagez un changement.
Photo de couverture : Image de Freepik
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